Covid-19 : Pourquoi vous devez prendre soin de votre nerf vague ?

le nerf vague

Le nerf vague est un nouvel acteur reconnu dans le contrôle de l’inflammation depuis les années 2000 et les publications du Professeur Kevin J. TRACEY de l’état de New-York aux Etats-Unis. Dans une étude1 réalisée sur deux patients atteints de Covid-19, la stimulation non invasive du nerf vague a montré des résultats encourageants et notamment un soulagement immédiat et constant des symptômes d’oppression thoracique et d’essoufflement, ainsi qu’une amélioration de la capacité à nettoyer ses poumons.

Qu’est-ce que le nerf vague ?

Le nerf vague est le plus long des nerfs crâniens. C’est le dixième nerf sur douze nerfs crâniens qui sortent de notre crâne. Le nom « vagus » vient du mot latin « errer ». En effet, le nerf vague prend naissance dans le cerveau et passe ensuite par le tronc cérébral puis descend dans le corps, où il innerve les poumons, le cœur, le foie, l’estomac, la rate et les intestins. A travers lui, le cerveau contrôle le fonctionnement de ces organes qui, à leur tour, l’utilisent pour envoyer des messages au cerveau l’informant de leur état mécanique ou chimique. Il est en fait responsable des viscères situés entre le haut du thorax et les deux tiers du côlon.

Cet acteur important du système nerveux autonome (qui règle certaines fonctions automatiques de l’organisme) intervient notamment sur le ralentissement du rythme cardiaque, sur la dilatation des vaisseaux à l’intérieur des organes, ainsi que sur les mouvements autonomes de l’estomac et des intestins. Via l’une de ses branches, le nerf récurrent qui remonte dans le larynx, il est aussi responsable de la motricité des cordes vocales et, s’il est lésé, il donne une voix rauque.

Figure 1: Les différentes fonctions du nerf vague.

Nous savons depuis vingt ans que le nerf vague permet de contrôler l’inflammation

Les agents pathogènes ainsi que le stress physique et d’autres formes de lésions activent la réponse inflammatoire, un phénomène physiologique nécessaire à l’élimination des microbes et à la réparation tissulaire. Cependant, si la réponse inflammatoire est déséquilibrée ou excessive ou non résolue, une maladie ou un choc septique ou anaphylactique peut apparaitre. Le nerf vague, en plus de son rôle dans sa fonction classiquement assignée de contrôler la fréquence cardiaque, la sécrétion d’hormone, le péristaltisme gastro-intestinal et la digestion, peut également être impliqué dans le contrôle des réponses immunitaires.

Les expériences initiales pour montrer le rôle du système nerveux parasympathique dans la régulation de la réponse immunitaire ont été réalisées dans un modèle d’infection septique expérimental chez le rat. Kevin Tracey et son équipe2 ont montré que la dissection chirurgicale du nerf vague augmentait la production de cytokines pro-inflammatoires et le développement du choc septique, alors que la stimulation électrique du nerf vague a empêché une inflammation systémique et à diminuer la mortalité. Cette étude révèle que l’activité du nerf vague exerce un potentiel immunomodulateur assez puissant. Le nerf vague émet des signaux en libérant de l’acétylcholine, son principal neurotransmetteur, à ses terminaisons nerveuses périphériques3. Le système vagal peut être considéré comme un circuit de contrôle inflammatoire du statut inflammatoire en périphérie4.

Ce contrôle de l’inflammation s’appelle « la voie anti-inflammatoire cholinergique », car elle passe par la libération d’acétylcholine. Si ce système chez les animaux est détruit, ils sont plus sensibles au choc endotoxémique5.

Par la suite, dans plusieurs études, il a été démontré que l’activation du nerf vague améliore différentes maladies chroniques inflammatoires. C’est le cas de la polyarthrite rhumatoïde ou de la maladie de Crohn, une maladie inflammatoire chronique de l’intestin, où des déséquilibres entre le système nerveux sympathique et le système nerveux parasympathique ont été décrits. Des diminutions d’activité du système parasympathique ont en effet été mises en évidence6.

Le réflèxe inflammatoire parasympathique pulmonaire

Un réflexe inflammatoire parasympathique pulmonaire, a même été proposé par certains chercheurs. Ce circuit modulateur pourrait lier les poumons, les systèmes immunitaire et nerveux et jouer un rôle très important dans la régulation de l’infection pulmonaire, de l’inflammation et de l’immunité à travers le nerf vague.

Figure 2: Le reflexe inflammatoire parasympathique pulmonaire

Pourquoi le nerf vague peut être dysfonctionnel chez les patients à risque de faire une forme plus grave du Covid-19 ?

Pendant cette pandémie de Covid-19, vous avez tous entendu parler de la fameuse tempête cytokinique, une réaction excessive du système immunitaire qui peut léser les tissus pulmonaires et éventuellement d’autre tissus. Vous savez aussi que les populations les plus à risque sont les personnes âgées ou souffrant d’obésité, d’hypertension, de diabète ou de maladies cardiovasculaires.

Nous savons depuis le début des années 2000 que le nerf vague est impliqué dans le contrôle de l’inflammation. Une dysfonction du système nerveux autonome a été montrée dans le diabète sucré7, les maladies cardiovasculaires8,  l’obésité9, l’hypertension10 et le vieillissement. Quelle que soit la maladie, la variabilité de la fréquence cardiaque, un témoin indirect du fonctionnement du nerf vague, diminue avec l’âge, atteignant, chez certaines personnes de plus de 65 ans, des niveaux qui sont un facteur de risque de mortalité11 or l’âge est aussi un facteur important de mortalité avec le CoVID-19.

La bonne nouvelle est que vous pouvez prendre soin de votre nerf vague…

De nombreuses pratiques permettent d’agir sur le système nerveux autonome, le système immunitaire et l’inflammation chronique. Le yoga, une ancienne méthode indienne, en fait partie. Le yoga utilise diverses méthodes de relaxation physique et mentale telles que les asanas, les exercices de respiration, les chants et la méditation. La pratique régulière du yoga aide à l’intégration du corps et de l’esprit et améliore ainsi la santé mentale et physique par la réduction du stress. Le yoga permet de diminuer le stress mais aussi les effets délétères du stress sur l’organisme et agit sur l’immunité a différents niveaux. D’une part, il diminue l’inflammation chronique et d’autre part il augmente l’immunité spécifique12Le Centre national pour la médecine complémentaire et intégrative aux Etats-Unis (NCCIH) a recommandé le yoga comme médecine corps-esprit.

D’autres approches sont également intéressantes pour réduire le stress et l’inflammation. Des essais contrôlés randomisés ont documenté des réductions de l’activité des cytokines pro-inflammatoires après plusieurs types d’intervention comportementale, notamment la thérapie cognitivo-comportementale13, l’exercice aérobie14, la méditation15 et le Tai Chi16. Les biomarqueurs affectés par de telles interventions incluent les protéines et cytokines pro-inflammatoires, par exemple, la protéine C-réactive, le facteur de nécrose tumorale, l’interleukine-6 et l’interleukine-1β.

D’autres données ont montré qu’une respiration lente à 8 respirations par min induisait une amélioration de la variabilité de la fréquence cardiaque (VFC) chez des patients souffrant d’hypertension essentielle17.

Bien que des recherches plus systématiques soient nécessaires, il a été démontré que diverses modifications du régime alimentaire améliorent aussi la VFC. Les exemples incluent un régime méditerranéen, des acides gras oméga-3, des vitamines B, des probiotiques, des polyphénols et une perte de poids. On a constaté que certains aspects du régime alimentaire considérés comme indésirables, par exemple des apports élevés en graisses saturées ou trans et en glucides à indice glycémique élevé, réduisent la VFC.

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Sources

  1. Staats, P., Giannakopoulos, G., Blake, J., Liebler, E. & Levy, R. M. Use of non-invasive vagus nerve stimulation to treat respiratory symptoms associated with COVID-19: A theoretical hypothesis and early clinical experience. Neuromodulation J. Int. Neuromodulation Soc. (2020) doi:10.1111/ner.13172.
  2. Borovikova, L. V. et al. Vagus nerve stimulation attenuates the systemic inflammatory response to endotoxin. Nature 405, 458–462 (2000).
  3. Vidal, C. Nicotinic receptors in the brain. Molecular biology, function, and therapeutics. Mol. Chem. Neuropathol. 28, 3–11 (1996).
  4. Tracey, K. J. The inflammatory reflex. Nature 420, 853–859 (2002).
  5. Pavlov, V. A., Wang, H., Czura, C. J., Friedman, S. G. & Tracey, K. J. The cholinergic anti-inflammatory pathway: a missing link in neuroimmunomodulation. Mol. Med. Camb. Mass 9, 125–134 (2003).
  6. Sharma, P., Makharia, G. K., Ahuja, V., Dwivedi, S. N. & Deepak, K. K. Autonomic dysfunctions in patients with inflammatory bowel disease in clinical remission. Dig. Dis. Sci. 54, 853–861 (2009).
  7. Kudat, H. et al. Heart rate variability in diabetes patients. J. Int. Med. Res. 34, 291–296 (2006).
  8. Thayer, J. F., Yamamoto, S. S. & Brosschot, J. F. The relationship of autonomic imbalance, heart rate variability and cardiovascular disease risk factors. Int. J. Cardiol. 141, 122–131 (2010).
  9. Kim, J. A. et al. Heart rate variability and obesity indices: emphasis on the response to noise and standing. J. Am. Board Fam. Pract. 18, 97–103 (2005).
  10. Carthy, E. R. Autonomic dysfunction in essential hypertension: A systematic review. Ann. Med. Surg. 2012 3, 2–7 (2014).
  11. Umetani, K., Singer, D. H., McCraty, R. & Atkinson, M. Twenty-four hour time domain heart rate variability and heart rate: relations to age and gender over nine decades. J. Am. Coll. Cardiol. 31, 593–601 (1998).
  12. Venkatesh, H. N., Ravish, H., Wilma Delphine Silvia, C. R. & Srinivas, H. Molecular Signature of the Immune Response to Yoga Therapy in Stress-related Chronic Disease Conditions: An Insight. Int. J. Yoga 13, 9–17 (2020).
  13. Zautra, A. J. et al. Comparison of cognitive behavioral and mindfulness meditation interventions on adaptation to rheumatoid arthritis for patients with and without history of recurrent depression. J. Consult. Clin. Psychol. 76, 408–421 (2008).
  14. Nicklas, B. J. et al. Exercise training and plasma C-reactive protein and interleukin-6 in elderly people. J. Am. Geriatr. Soc. 56, 2045–2052 (2008).
  15. Pace, T. W. W. et al. Effect of compassion meditation on neuroendocrine, innate immune and behavioral responses to psychosocial stress. Psychoneuroendocrinology 34, 87–98 (2009).
  16. Irwin, M. R. & Olmstead, R. Mitigating cellular inflammation in older adults: a randomized controlled trial of Tai Chi Chih. Am. J. Geriatr. Psychiatry Off. J. Am. Assoc. Geriatr. Psychiatry 20, 764–772 (2012).
  17. Li, C., Chang, Q., Zhang, J. & Chai, W. Effects of slow breathing rate on heart rate variability and arterial baroreflex sensitivity in essential hypertension. Medicine (Baltimore) 97, (2018).

A propos de l’auteur

Karine Bernard

Naturopathe, formatrice, conférencière et docteur en sciences (spécialité immunologie), je suis la fondatrice de la méthode ISIS “Solutions en immunomodulation intégrative et systémique”. Je suis également à l’origine du site  immunonaturo.com, un blog dédié à la santé et au bien-être qui fait la part belle à votre système immunitaire.