Mangez des aliments fermentés, c’est bon pour votre santé et votre immunité

boostez votre immunité

Elie Metchnikoff, un des pionniers de l’immunologie et prix Nobel en 1908 pour ses travaux sur la phagocytose, est considéré comme précurseur dans l’histoire des probiotiques après avoir publié sur les bénéfices santé des laits fermentés et leurs composés actifs, les bactéries lactiques1. En effet, il avait remarqué que les paysans bulgares avaient une durée de vie de quatre-vingt-sept ans en moyenne, ce qui était exceptionnel pour les années 1900. Cette longévité ne pouvait pas s’expliquer par les avancées de la médecine moderne, car la Bulgarie, l’un des pays les plus pauvres d’Europe à l’époque, n’en bénéficiait pas.

En faisant des recherches sur leur alimentation, Metchnikoff découvrit dans le lait fermenté bulgare une bactérie unique, productrice d’acide lactique, le Lactobacillus bulgaricus. Il émit alors l’hypothèse que cette longévité était due à une grande consommation de microorganismes vivants provenant du lait fermenté. Metchnikoff considérait que l’intestin pouvait être le lien de processus de putréfaction délétère pour l’hôte, processus pouvant être stoppé par le biais de bactéries lactiques2.

Les bactéries lactiques sont des bactéries utilisées depuis des temps anciens, pour leur contribution au développement de la saveur et de la texture des aliments, pour leur rôle clé dans la conservation des aliments, mais également dans la fabrication de produits alimentaires notamment les produits laitiers, les légumes fermentés, les pâtes fermentées et les boissons alcoolisées. Les bactéries lactiques constituent un groupe hétérogène de bactéries appartenant à de nombreux genres tels que Lactobacillus, Bifidobacterium, Streptococcus et Enterococcus. Elles sont caractérisées par leur compétence à fermenter les sucres en acide lactique.

Les bénéfices des aliments fermentés sur la santé

Une nouvelle étude sortie en aout 2021 vient de confirmer les intuitions d’Elie Metchnikov. Elle a été publiée dans le prestigieux journal scientifique « Cell », le journal dans lequel tous les chercheurs rêvent de publier un jour tellement le facteur d’impact est important. Elle est considérée, par les biologistes de toutes spécialités, comme la revue la plus prestigieuse pour publier, devant Nature ou Science qui sont plus « sensationnalistes » et généralistes. Le facteur d’impact de la revue Cell en 2019 était de 38.

Les auteurs de cette étude, chercheurs à Stanford, ont découvert qu’un régime alimentaire de 10 semaines riche en aliments fermentés stimule la diversité du microbiome et améliore les réponses immunitaires et notamment diminue de nombreux marqueurs inflammatoires. Dans cet essai clinique, 36 adultes en bonne santé ont été assignés au hasard à un régime comprenant des aliments fermentés ou des aliments riches en fibres.

Les chercheurs se sont concentrés sur les fibres et les aliments fermentés en raison de rapports antérieurs sur leurs bienfaits potentiels pour la santé. Alors que les régimes riches en fibres ont été associés à des taux de mortalité plus faibles, la consommation d’aliments fermentés peut aider au maintien du poids et peut réduire le risque de diabète, de cancer et de maladies cardiovasculaires.

Les chercheurs ont analysé des échantillons de sang et de selles prélevés au cours d’une période de pré-essai de trois semaines, les 10 semaines du régime et une période de quatre semaines après le régime lorsque les participants mangeaient comme ils l’avaient choisi.

Les deux régimes ont eu des effets différents sur le microbiome intestinal et le système immunitaire.

La consommation d’aliments fermentés tels que le yogourt, le kéfir, le fromage cottage fermenté, le thé kombucha,  le kimchi et d’autres légumes fermentés a entraîné une augmentation de la diversité microbienne globale. Or la faible diversité du microbiome a été liée à l’obésité et au diabète. Les chercheurs ont aussi observé que plus les portions d’aliments fermentés étaient importantes et plus les effets sur le microbiote était visibles.

Les niveaux de 19 protéines inflammatoires mesurés dans des échantillons de sang ont également diminué. L’une de ces protéines, l’interleukine 6, a été associée à des affections telles que la polyarthrite rhumatoïde, le diabète de type 2 et le stress chronique.

En revanche, aucune de ces 19 protéines inflammatoires n’a diminué chez les participants soumis à un régime riche en fibres, riche en légumineuses, graines, grains entiers, noix, légumes et fruits. En moyenne, la diversité de leurs microbes intestinaux est également restée stable.

« Nous nous attendions à ce que la teneur élevée en fibres ait un effet bénéfique plus universel et augmente la diversité du microbiote », a déclaré Erica Sonnenburg, PhD, chercheuse principale en sciences fondamentales de la vie, en microbiologie et en immunologie. « Les données suggèrent qu’une augmentation de l’apport en fibres à elle seule sur une courte période est insuffisante pour augmenter la diversité du microbiote. »

Les résultats brossent un tableau nuancé de l’influence de l’alimentation sur les microbes intestinaux et le statut immunitaire.

  • D’une part, ceux qui ont augmenté leur consommation d’aliments fermentés ont montré des effets similaires sur la diversité de leur microbiome et leurs marqueurs inflammatoires, conformément à des recherches antérieures montrant que des changements à court terme dans l’alimentation peuvent altérer rapidement le microbiome intestinal.
  • D’autre part, le changement limité du microbiome au sein du groupe à haute teneur en fibres concorde avec les rapports précédents des chercheurs sur une résilience générale du microbiome humain sur de courtes périodes de temps.

« Les régimes alimentaires ciblés sur le microbiote peuvent modifier l’état immunitaire, offrant une voie prometteuse pour réduire l’inflammation chez les adultes en bonne santé », a déclaré Christopher Gardner, PhD, directeur des études de nutrition au Stanford Prevention Research Center. « Ce résultat était cohérent chez tous les participants à l’étude qui ont été affectés au groupe d’aliments fermentés les plus élevés. »

Les points forts de cette étude

  1. Le régime alimentaire fermenté augmente la diversité du microbiome et diminue les marqueurs de l’inflammation
  2. Un régime riche en fibres modifie la fonction du microbiome et permet notamment la synthèse d’acides gras à chaines courtes
  3. Cette étude montre que l’ont peut agir favorablement sur le microbiote et l’immunité en modifiant l’assiette. 

Les microbes utilisés pour la fermentation

Les bactéries lactiques

Les lactobacilles

Chez l’homme, les lactobacilles retrouvés au niveau des muqueuses orale, gastrointestinale et vaginale sont les premières bactéries à coloniser l’intestin du nourrisson après un accouchement par voie basse. Certains lactobacilles sont utilisés pour la production de yaourts, fromages, choucroutes, cornichons, pains au levain, vins et autres produits fermentés. Ces micro-organismes sont couramment choisis comme probiotiques car ils expriment de nombreuses propriétés cruciales telles qu’une haute tolérance à l’acidité des sucs gastriques et à la bile, une forte capacité à adhérer aux cellules intestinales et une activité antimicrobienne3.

Les bifidobactéries

Vous avez surement entendu parler des yaourts au Bifidus. Ces yaourts contiennent des bactéries du genre Bifidobacterium qui comptent aujourd’hui quarante-huit espèces issues du monde humain et animal, et appartenant à la famille des Bifidobacteriaceae. Ces bactéries existent naturellement sur diverses parties du corps humain telles que le tractus gastro-intestinal (bouche, bronches et intestin), le vagin, mais aussi de l’environnement tel que les eaux usées. Les souches du genre Bifidobacterium sont également utilisées comme bactéries probiotiques pour leurs différentes propriétés. Les effets sur la santé apportés par les bactéries appartenant au genre Bifidobacterium vont dépendre de la dose et de la souche utilisée.

Les levures

Les levures sont des champignons unicellulaires, utilisés dans l’industrie alimentaire pour la production de boissons alcoolisées par fermentation alcoolique, telles que la bière, le vin, l’alcool industriel et le saké mais également dans la fabrication du pain (panification). La fermentation est une des formes les plus anciennes de transformation et de conservation des aliments dans le monde. Les levures actuellement employées comme probiotique dans les produits pharmaceutiques (compléments alimentaires ou médicaments) appartiennent au genre saccharomyces.

Saccharomyces Cerevisiae Var. Boulardii

Saccharomyces boulardii CNCM I-745 (S. boulardii) est une levure non pathogène découverte en 1923 par un microbiologiste français en Indochine. Elle a depuis été largement utilisée comme probiotique dans la prévention et le traitement des troubles gastro-intestinaux. En tant que levure, S. boulardii se distingue des probiotiques bactériens, en particulier en raison de sa résistance intrinsèque au traitement antibiotique. En outre, S. boulardii peut s’adapter et survivre dans le tractus gastro-intestinal en raison de sa capacité à croître à 37 ° C et sa résistance à un pH gastrique bas et aux acides biliaires. La levure Saccharomyces Boulardii est très étudiée et semble présenter des propriétés probiotiques intéressantes dans le traitement et la prévention de certaines infections intestinales liées aux bactéries pathogènes, levures et parasites. Elle pourrait protéger contre le développement des espèces de Candida et même d’Helicobacter pylori, la bactérie responsable des ulcères gastriques. Saccharomyces Boulardii favorise la production des immunoglobulines sécrétoires IgA qui sont un élément clé de notre système immunitaire. Cette souche a fait, par le passé, l’objet d’études montrant son efficacité dans la prévention des diarrhées post antibiothérapie. Plus récemment, le rôle bénéfique de Saccharomyces Boulardii a été démontré pour ses effets anti-toxines, antimicrobiens, trophiques sur la production de mucus par l’intestin, et pour sa capacité à améliorer la production de butyrate4. Elle a aussi montré son efficacité sur le traitement de la diarrhée des voyageurs et la réduction de la durée de la diarrhée5.  Elle pourrait aussi avoir un intérêt dans le traitement de l’intestin perméable et des pathologies associées6.

Alors, passez à l’action !

Il ne vous reste donc plus qu’à consommer quotidiennement des aliments fermentés tels que le yogourt, le kéfir, le fromage fermenté, le kimchi, les jus de légumes fermentés, la choucroute, les cornichons, le miso, les sauces soja et tamari et le thé kombucha. Parmi les jus de légumes fermentés, mon préféré est sans hésitation le jus de carotte fermenté. En plus de la fermentation, il a aussi l’avantage de contenir un taux de sucre bien inférieur au jus de carotte classique puisque le sucre a été transformé en grande partie par les bactéries lactiques en acide lactique. Donc ne vous en privez pas. Avec sa richesse en bêta-carotène, il vous fera en plus un joli bronzage.

Partagez cet article

Pour en savoir plus sur la prise en charge du terrain immunitaire, ses facteurs de déstabilisation et les solutions naturelles pour améliorer votre immunité, je vous invite à lire le livre suivant :

Réinventons notre immunité

Pour en savoir plus sur les méthodes anti-inflammatoires, je vous invite à lire les livres numériques suivants :

alimentation anti-inflammatoire
Prenez soin de vous en stimulant votre nerf vague

Si vous voulez en savoir plus sur les méthodes naturelles pour renforcer votre immunité et votre terrain immunitaire, je vous invite à lire

A propos de l’auteur

Karine Bernard

Naturopathe, formatrice, conférencière et docteur en sciences (spécialité immunologie), je suis la fondatrice de la méthode ISIS “Solutions en immunomodulation intégrative et systémique”. Je suis également à l’origine du site  immunonaturo.com, un blog dédié à la santé et au bien-être qui fait la part belle à votre système immunitaire.